Les tableaux de Frederick Simpson Coburn représentant des chevaux tirant des rondins à travers des paysages boisés enneigés, ou des traîneaux rouge vif le long de routes de campagnes ensoleillées, reproduisent le climat de toute une époque. Depuis la fin des années 1920, ses scènes dhiver apparaissent régulièrement sur les cartes de Noël et les calendriers, car, comme la remarqué un, collectionneur, "le titre de ses toiles est Le 'Canada'." La façon unique dont ce peintre a traité les effets lumineux de nuages dhiver a donne naissance au terme 'Coburn sky'. Gerald Stevens écrivait, dans sa biographie de lartiste (Frederick Simpson Coburn, 1958): "Les chevaux constituent bien sûr le premier grand amour de Coburn. Mais ensuite viennent les ciels des ciels clairs et froids [ou] couverts de masses de nuages menaçants à travers lesquels transparaît un soleil voilé éclairant de lointaines collines; ou... un ciel de fin dhiver, plus chaud, ou flottent de légers cumulus.... Plusieurs des plus grands artistes canadiens ont bien représenté les chevaux, mais en réalité aucun na réussi à représenter des ciels aussi vrais avec autant de talent."
F.S. Coburn naquit le 18 mars 1871 dans le petit village de Upper Melbourne dans les Cantons de lEst, à environ 90 milles au sud-est de Montréal. Dans le milieu très uni ou il passa son enfance, son talent attira très vite lattention. Peu après sêtre inscrit à lécole du Council of Arts and Manufactures de Montréal, il dépassa rapidement les possibilités offertes et dut aller à la Carl Hecker School of Art de New York. En 1890, à 19 ans, il se rendit à lAcadémie royale de Berlin afin dentreprendre des études dans le domaine de lart international.
En Allemagne, il apprit lart du dessin avec Erhentraut et Skarbina soit comment reproduire lanatomie humaine avec une précision presque photographique. À Paris, il fut lun des rares à être choisis pour travailler sous la direction du maître, Jean-Léon Gérôme, dans son atelier. Cest dans cette ville quil fut aussi soumis à linfluence "radicale" de lImpressionnisme et quil connut les merveilles des cafés bohèmes et des salons de danse fréquentés par ses amis canadiens qui étudiaient les arts, ainsi que par des connaissances comme Toulouse-Lautrec. Par opposition h sa formation allemande, à la Slade School de Londres, Henry Tonks lui apprit à interpréter son sujet plutôt que de sefforcer de le représenter le plus parfaitement possible.
Plus tard, sa fascination pour lÉcole de La Haye le conduisit en Hollande où son amitié pour les frères célèbres Maris et J.H. de Weissenbruch eut une influence à long terme sur son art. Pendant cette "période hollandaise", il expérimenta différentes palettes et peignit les chaumières, les paisibles bovins, les mornes rivages et les moulins à vent de la campagne environnante. Ses intérieurs hollandais représentent bien lâme des habitants chez qui il vécut.
Durant son séjour outre-mer, il ne maîtrisa pas seulement une variété de techniques artistiques mais apprit aussi le français, lallemand, le hollandais et le flamand. Dautre part, ses fréquents retours au Québec lui permirent de maintenir les liens avec sa patrie dorigine.
En1896, âgé alors de 25 ans, il sassocia au poète québécois William Henry Drummond afin dillustrer son premier recueil de poèmes sur le Québec rural, The Habitant (1897). Pour ce faire, Coburn passa des semaines chez des familles de paysans, faisant des croquis de son sujet dans les moindres détails. Ses illustrations reflètent bien l5me de la société paysanne. Il continua dailleurs à illustrer toutes les oeuvres de Drummond.
Impressionné par le travail de Coburn sur loeuvre de Drummond, le poète québécois Louis Fréchette chargea lartiste dillustrer son livre Christmas in French Canada (1899) suivi de lédition française La Noël au Canada (1900). Une longue et fructueuse collaboration sétablit avec léditeur de Drummond, G.P. Putnam Company-de New York, pour qui Coburn illustra plusieurs éditions classiques des oeuvres de Alfred Lord Tennyson, Charles Dickens, Edgar Allan Poe, Washington Irving, Oliver Goldsmith, Robert Browning et plusieurs autres. Il fut aussi chargé dillustrer des pages couvertures et des articles de revues. Ce sont ces travaux dillustrations qui permirent à Coburn de vivre durant son séjour détude en Europe.
En 1897, alors quil séjournait à Antwerp en Belgique et étudiait sous la direction de Abrecht de Vrient, Coburn fut le premier de sa classe de trente artistes. En 1898, il obtint la subvention "Goot" octroyée par le gouvernement, belge, qui lui donnait droit à trois années détudes gratuites. Ceci lui permit de soulager un peu létat de pauvreté dans lequel il vécut outre-mer.
Cest à Antwerp quil rencontra celle qui allait devenir son épouse, la talentueuse artiste belge Malvina Scheepers. Ensemble, ils installèrent leur maison-atelier dans le village natal de Coburn, Upper Melbourne, et un pied-à-terre à Montréal.
Durant cette période du début du vingtième siècle, Coburn commença à intégrer les techniques avancées quil avait apprises des Européens à sa propre vision. Il peignit tout dabord des compositions florales, des portraits et des paysages printaniers et estivaux des Cantons de lEst. Linfluence hollandaise est visible dans ces toiles, Ensuite, les voyages où il faisait des croquis avec son grand ami et mentor lartiste Maurice Cullen furent à lorigine dun changement soudain. Inspiré et stimulé par la fascination de Cullen pour lhiver canadien, Coburn rejeta sa palette de couleurs ternes et vieillottes pour expérimenter avec les couleurs vives et éclatantes. Commes ses collègues québécois Clarence Gagnon, Suzor-Côté, James Morrice, Maurice Cullen et bien dautres qui étaient rentrés au Québec après un séjour en Europe, il était déterminé à représenter latmosphère de lhiver canadien avec sa lumière éblouissante, ses couleurs éclatantes et ses mystérieux jeux dombre sur la neige. Linstinct inné quil avait si merveilleusement exploité dans ses illustrations de la vie rurale atteignit sa pleine maturité dans ses huiles qui reflétaient la culture et lesprit de son temps. Ainsi, ce qui avait débuté comme une expérience fut accueilli avec enthousiasme par le public.
En1928, à 57 ans, Coburn fut nommé membre de lAcadhmie royale canadienne des Arts et, en 1941, membre "Senior." Ses tableaux furent exposés dans les galeries dart à travers le pays et dans les musées et firent partie des collection privées jusquen Australie et au Japon.
Loeuvre de Coburn a été exposée au Canada et à létranger. En 1928, deux de ses toiles furent exposées à la Imperial Gallery of Art Exhibition de Londres. En 1929, il reçut le prix Jessie Dow de lAssociation des Arts de Montréal pour le tableau "March Morning".
En 1932, le Club des Arts de Montréal organisa une exposition de ses illustrations des pohmes de Drummond. Un doctorat honorifique lui fut décerné en 1936 par luniversité Bishops de Lennoxville au Québec. Il envoya deux de ses tableaux à lexposition "A Century of Canadian Art" organisée en 1938 par la Tate Gallery de Londres. Ceci nest quun aperçu de tout ce que lui a valu son talent.

Soudainement en1933, alors que Coburn était âgé de 62 ans, son épouse Malvina mourut pendant leurs vacances à Paris. Coburn en fut foudroyé. Miné de chagrin par cette perte et désillusionné par le fait quil était classé comme un artiste ne sachant peindre que des scènes dhiver avec des chevaux scènes qui lavaient rendu célèbre il perdit toute motivation. Ceci dura jusquà ce que lun de ses amis, lartiste Edmond Dyonnet, le pousse à rencontrer le beau modèle, la danseuse professionnelle Carlotta. Il sensuivit une relation qui dura 27 ans et qui devint une source dinspiration pour lui, non seulement en tant quartiste, mais aussi comme danseur et photographe.
Encouragé par la demande répétée du public, il sefforça de parfaire ses scènes dhiver. Ainsi, William Colgate écrivait dans Canadian Art: Its Origin and Development (1943) : "De nos jours, presquaucun peintre canadien ne jouit dune aussi grande réputation.... De toute évidence, il voit dans un sujet une occasion de créer des effets de lumière et de subtiles harmonies de couleurs."
Coburn se mit aussi à peindre des portraits grandeur nature de Carlotta dans les fabuleux costumes de danse quelle avait créés pour ses interprétations; on y retrouve les toiles intitulées "Tango" ainsi que "Boléro," "Rumba de Cuba" et "Cake Walk" qui furent exposées à la 53ième exposition de printemps de lAssociation des Arts de Montréal en1936. Il la peignit nue, drapée dans des voiles et des soies de Chine. Il fit construire une plate- forme sur la colline surplombant son atelier de Melbourne et prit dextraordinaires photographies delle en train de danser vêtue de jupes tziganes tourbillonnant sur un fond de ciel et de nuages. (Quelques-unes de ces photographies furent publiées plus tard sur les couvertures de revues de danse américaines.) II réalisa aussi son rêve dapprendre à danser et avec Carlotta et son partenaire, le danseur Alvarez, il établit un studio de danse à Montréal. Ce fut là, entouré de ses tableaux de Carlotta et de sa "famille" de compagnons artistes et danseurs, que Coburn passa quelques-uns de ses plus heureux moments.
Laprès-midi du 26 mai 1960, à 89 ans, Frederick Simpson Coburn séteignit paisiblement dans son atelier de Melbourne.